Une manière de raconter: danser. C’est avec Anne Martin, qui a été danseuse chez Pina Bausch et professeure au C.N.S.D de Lyon que la danse-théâtre a eu sa place, lors d’un enseignement en l’île de Saint-Pierre, accompagnée par l’association Croq’paroles. Les pierres liquides se sont mises à parler, nos corps aussi.
Danser. Texte extrait de Comme Sophie Calle, dans le secret de nos écrits. Collaboration texte-photos avec Mathilde Cudeville.
« Je t’ai aimé à la folie. A la folie, je t’ai aimé. Je n’aurais jamais cru. Jamais cru que tu m’offrirais la danse ceinte sur ma peau. J’ai écarté mes bras. J’ai dit ton nom dans le vent. J’ai chanté ta voix. J’ai dansé ton souffle. J’ai respiré ton pouls. Déchiré mon coeur. Je t’ai aimé à la folie. A la folie, je t’ai aimé et n’ai pu me calmer qu’en pleurant dans le vent, qu’en m’inclinant devant cet amour qui me fait danser à la folie dans le vent. J’ai couru sur la dune, j’ai hurlé dans le vide, j’ai saigné mes seins, j’ai convoqué les esprits. L’esprit du froid qui me mord la bouche et me somme de me taire. L’esprit des rocs qui me fissure de douleur et m’ordonne de te chasser. L’esprit de l’océan qui me submerge pour te noyer. L’esprit des lichens qui ravale mes larmes pour les laisser à d’autres. Un seul être, tu me manques, et tout se siphonne, dit-il. Manquer est faux, c’est hurler en silence ton nom, hurler et ma voix s’est éteinte, mon pied s’est brisé, je danse. Je t’ai aimé à la folie. A la folie, je t’ai aimé. Et c’est impossible à dire, impossible à écrire, impossible à entendre, impossible à vivre, mais ne peut être que dansé, ne peut être que porté dans la tempête. Tempête en mon corps. Souffle dans mes bras grands écartés, prolongement de mon coeur embrûlé de toi, écartelé de ce que j’explose, ta vie, l’éclatement de ma pulpe jusqu’à la plage où je danse, danse et danserai encore, immergée de toi, déséquilibrée de toi. Je t’aime à la folie. A la folie, je t’aime encore. Et chaque geste est un hurlement, où délice et douleur s’enroulent autour de mon coeur. En lierre, et me fait ellipse, en accroche et me fait suspend, en tornade et me fait disparition, en morsure et me fait belle, en suspens et me fait douloureuse, en arrêt et me fait amoureuse, je danse et danse encore, le temps en suspens. Je t’aime à la folie. A la folie, je t’aime et je danse, et danse et danse encore dans le vent. Et dans ce vent, je suis vivante, je suis la vie, je suis, sans attente, ce que je suis, la danse dans le vent et l’amour, et l’amour, et l’amour, et je danse, et je danse, et je danse encore… »
Raconter des histoires de « quand j’étais petite », mes préférées, celles qui finissaient mal ou dans lesquelles le corps était en jeu, l’apprentissage de la brutalité et du chagrin. Gargouilligouilla, La petite Sirène, Barbe-Bleue. Il m’arrive de les raconter en conclusion d’un atelier, lorsque les petits commencent à trouver le temps long. Mais aussi lors de festivals, comme pour les Transboréales ou lors de soirées thématiques. Des histoires traditionnelles germaniques et nordiques, pour la plupart. Des histoires « en tête » comme me disait Justine, quand elle était petite, ma chère belle-fille.
Lors de la célébration de la Saint-Nicolas, fête que je ne rate jamais et que mes amis insulaires connaissent désormais par coeur, évidemment les bredele et les mannele sont de la partie, avec vin et chocolat chaud, comme en décembre 2020, dans le merveilleux bistrot de Nathalie Goupillière, L’Essentiel Création, effet-mer.